La poésie de Marie-Lise Corneille s’ébruite, effleure, écoule ses rumeurs entre des lignes épurées et radieuses. Ses mots offrent une voix et la faille des ombres s’élargit pour contempler cette lumière dont nous descendons. Au gré de ses contractions poétiques, l’auteure nous abandonne aux mouvements de l’air, de la terre, des bruissements. Comme elle le dit elle-même à travers la poésie, j’entends la musique secrète des événements.
Marie-Lise Corneille dit simplement notre présence au monde, à doux éclats, comme un ruisseau humble et sûr un jour de voir la mer. Une poétique de la transparence, de l’effacement est sa façon de resplendir en peine clarté. Elle tente une passerelle entre le souffle et la forme.
Je la cite : l’écriture s’enfouit dans la pulpe de l’espace pour être attentive à la vibration secrète des vies, des paysages, des corps, des gestes, des événements ; pour effleurer le silence, éveiller la musique intime de leur double mystérieux.
Ses écrits pénètrent le regard et notent les choses éminemment fragiles, les détails d’une cartographie solennelle et de ses secrets mouvements. Marie-Lise Corneille sème en nous le clair-obscur de notre condition. A travers une plume messagère, elle nous trace l’illusion tenace d’être quelque chose. Nous nous tenons dans l’infime équilibre d’un manque sacré et d’une parole au corps nu, comme elle le définit elle-même.
L’auteure traque l’éphémère avec le filet à papillons des mots et croque l’ineffable, l’infiniment transitoire. Je la cite : rapt chorégraphié du désir. Elle cherche à tisser une musique à partir de l’ombre et de cette absence qui nous renouvelle dans l’instant à naître. Elle capte les secrets de nos oisivetés en panache et allie l’intensité à la transparence.
Sa plume coule une douce grâce, lumineuse, pleine et éveille des écritures délicates. Marie-Lise Corneille emprunte la transparence des éclats et nous restitue ses prestigieux mouvements. Elle désigne et concentre une quête dramatisée de la présence et la métamorphose en parole à mûrir dans la plénitude exacte de l’être comme elle l’écrit souverainement. Pouvons-nous nous tenir dans cet état … ? Nous en avons l’espoir… L’auteur revêt le bonheur du poète : consentir au silence au sein même de la parole.
Dans sa poésie, dans une configuration vivante, le temps scintille et prend corps. Dans un Mystère qui nous instruit et nous élève, descend une seule lumière dont nous jouissons par ascendance. Ce nous appelons de nos yeux est devenue une transparence convoquée à l’illumination. Nous nous tenons prêts à toucher, enfanter le monde dans la quiétude du vertige. Je la cite – quel glaive de feu éblouira l’angoisse ? Des frissons effritent l’effigie. Sommes-nous alors écoulés ou immobilisés ? Marie-Lise Corneille crée des interférences poétiques entre l’au-delà et l’en-deçà maintenant réunis.
Marie-Lise Corneille nous transmet la pluralité, la simultanéité des perceptions foisonnantes du réel, écrit Nicole Durand dans la préface du livre Dans le jeûne de la parure dernièrement paru chez L’Harmattan. Le silence est la racine de l’acte. L’intention va percer l’apparence, répond l’auteure.
L’auteure s’éprend d’une extrémité de la parole qui fasse résonner la génitalité du silence comme une langue maternelle. Je la cite Le silence est la racine de l’acte. Marie-Lise Corneille nous présente la sensorialité comme une épreuve du langage originaire, une volupté natale où nous pouvons nous reconnaître. Dans son suaire de silence nous avons une langue mère.
Anne de COMMINES