LES PARTITIONS ELECTRIQUES

La poésie de Jacques Fontaine est composée de chair et d’âme aux intentions d’art. De ses entrailles jaillissent des extases, des soupirs, les ronces de la passion, les romances de la peine, bref, des dimensions d’homme. Inspiré, il nous rapporte ses transes sous-jacentes et ses motifs calligraphiés. L’amour, la haine, la névrose, les animaux de métal, Jacques Fontaine nous livre ardemment des accents inouïs et virils. « A cœur et à cris » nous expose une condition humaine où le drame est dit. Frappée ou modelée, la dramaturgie couve des convulsions et l’auteur les transforme en lignes musicales « dans le secret ouaté des naissances » comme il l’écrit lui-même.

Son recueil est une création active, une pensée en lutte où s’acharnent et se défont les corps. Avec souffle, la gorge embrasée, le poète orne ces jaillissements de l’âme comme des étincelles électriques. Fulgurants, parfois douloureux, les mots de Jacques Fontaine nous assaillent et nous trempent bruyamment dans des cataractes où implosent des images inattendues et des impulsions musicales. Je le cite : « Exténué par le fatal effroi des chairs. »

Ses cris concassent des échos où s’inclinent nos fronts stupéfaits. Des voix rondes comme des anneaux enchaînent les cieux et innervent des orages. Par endroits, l’auteur s’immisce  dans le germe, incurve une lumière trop brutale, la laisse choir dans l’ombre en pesant bien les transparences. Poète écorché par les appels et les gravités, Jacques Fontaine fait trembler les phrases et signifie nos vertiges. Je le cite : « La courbe des reins assouplis, lubrique, vibre au frémissement clair de la peau endémique. » « J’exulte et je geins de ne pouvoir effleurer le corps électrique. »

L’auteur laisse ruisseler la poésie comme une source, il porte la lumière à sa substance et déroule notre âme vaste et inquiète. Ses ombres échangent leurs songes, déchiffrent ses illusions fugitives, transmuent l’insaisissable en un corps fragile où soufflent nos initiales. Ses chagrins et ses flamboiements épousent les étoiles et Jacques Fontaine dessine des symboles comme des métaphysiques à visiter. Je le cite : « Un appel bruissant et taciturne qui résonne dans la corne spiralée de la transcendance. »

Les yeux guerriers ou l’âme allègre, le poète interroge les questions en leur mouvement. A mains diurnes ou nocturnes, il trace de belles inconstances, puise les hasards observateurs dans le fond des utopies. Jacques Fontaine est gagné par la création des immortels élans et cherche le rythme spectral de l’image en son reflet. Le corps en partition, il s’éclaire aux nuits blanchies et laisse le signe dénuder la réalité et ses substances âcres. Je le cite « Mes yeux sonnent et coulent dans mes veines rompues. »

Ses pages sont un théâtre de l’action. Dans une langue héroïque, il sollicite et consume le poème, puis assemble le rêve charnel dans une mystique primitive. Ses dessins écrits, ses percées dissolvantes de mots et d’images composent et décomposent les fusions analytiques des questions et des réponses. Dans le corps sévit la crise convulsive du langage. Frappé d’une poésie violente, Jacques Fontaine lève un Verbe à ses visions sacrales, nous livre ses figures comme des symptômes et des prophéties névralgiques. Je le cite : « Asservi en sensualités sourdes, Prince ou loubard, l’assemblage verni et ténébreux me rendit homme. » Poésie de la force, du feu, des gouffres, l’auteur foule les profondeurs et puise en elles des pulsations rebelles et fécondes. « A cœur et à Cris » appelle la vision solaire, la transe occulte et les turbulences des passions affolées.

Anne de Commines

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